jeudi 21 mai 2020

"ASCENSEUR POUR L'ÉCHAFAUD" de Louis Malle (1958)




Après un documentaire "Le monde du silence" (rien de moins que la Palme d'or de 1955) Louis Malle réalise son premier long métrage "Ascenseur pour l'échafaud" en 1958.
Inspiré du roman éponyme de Noël Calef (publié en 1956) le film met en scéne un couple d'amants meurtriers. L'homme, Julien (Maurice Ronet), assassine son patron aidé dans sa funeste tâche par Florence (Jeanne Moreau) femme de ce dernier et maîtresse de ce premier.
Une panne d'ascenseur inopinée mettra quelque peu à mal leur crime parfait...

A peine âgé de 25 ans le réalisateur démontre déjà avec ce film une étonnante maîtrise de son art.
Pourtant le pari était tout sauf gagné d'avance... Que l'on y pense, les protagonistes du film sont aussi antipathiques qu'amoraux ! Qu'est ce qui empêche le couple d'amants d'officialiser leur relation en dehors d'un meurtre ? L'autre couple miroir du film (la jeune fleuriste et son voyou de copain) ne sont mus, eux aussi, que par leurs bas instincts et par l’appât du gain.

Que l'on parle des acteurs : si chacun d'entre eux est excellent dans son rôle, on ne peut s’empêcher de regretter leur jeu (délibérément) plein d'emphase monocorde. La scéne d'introduction à elle seule représente tous les travers d'une époque : les acteurs monologuent de façon très appuyée sans exprimer la moindre émotion (alors qu'ils sont supposés montrer leurs sentiments). On ne peut s’empêcher de penser immédiatement à Jean-Pierre Léaud (champion toutes catégories du Jouer-faux). En ce sens "Ascenseur pour l'échafaud" préfigure Truffaut et toute la Nouvelle vague avec lui !

En définitive qu'est ce qui fait que ce film soit resté si unique dans les annales du cinémas ? Bien évidemment son coté avant-gardiste et ses indéniables qualités esthétiques, mais la popularité du film ne tient-elle pas avant tout à sa Bande Originale ? Signée par Miles Davis, la musique (en grande partie improvisée pendant la projection) illustre autant le film qu'il le transcende. Après tout le Jazz ne rime t-il pas particulièrement bien avec Paris la nuit ?

Quoi qu'il en soit ce premier article post-confinement a été fait dans la joie de la liberté (relative) retrouvée, mais il a été un peu gâché par des travaux qui défigurent encore Paris en ce moment, comme nous allons le voir...

(Toutes les captures d'écran ici présentées sont la propriété des Nouvelles Éditions de Films)

0h02 : Le générique commence avec des images de la Consortium Carala, l'entreprise où travaille Julien Tavernier. Le bureau de son patron se situe au dernier étage.
De nos jours la façade de l'immeuble (situé au 29 rue de courcelles) a bien changé puisqu'elle a totalement été remaniée ! Les deux derniers étages en terrasse sont, par contre, encore reconnaissables.

0h06 : Julien, après s’être enfermé dans son bureau, sort par la fenêtre et escalade la façade de l'immeuble.
J'ai tiré cette image du Streetview pour la bonne raison que l'immeuble sur la droite est actuellement en travaux. Par ailleurs il est amusant de noter que la photo du film, prise de haut, est trompeuse puisqu'elle donne l'impression que les deux immeubles sont quasiment côte à côte. Dans la réalité il n'en est rien, un pâté de maison les sépare. 

L'immeuble du Consortium Carala apparaît une nouvelle fois à 21 minutes de film, alors que Julien passe la nuit enfermé dans l'ascenseur récalcitrant... 
Pour le coup, la rénovation de l'immeuble fut heureuse car il a nettement meilleure allure de nos jours.

1h00 : Dernière vue générale de l'immeuble après que Julien se fut libéré de sa prison élévatrice...
Le 29 rue de Courcelles vu de l'autre côté. (Sa façade de gauche est en travaux, ainsi que le bâtiment lui faisant face - Voir la photo précédente). 

0h13 : La jeune fleuriste, Véronique, aime bien les Bad boys, son petit ami Louis est un vrai blouson noir.
Si la devanture du 168 boulevard Haussmann a changé, c'est néanmoins toujours un fleuriste qui occupe cet endroit !

Louis s'admire dans la vitrine !
Bien que fermé pour cause de Covid-19 la vitrine du fleuriste René Veyrat est toujours impeccable.



0h13 : Véronique confesse son admiration pour la classe de Julien Tavernier.
La boutique du fleuriste offre une vue imprenable sur l'immeuble du Consortium Carala... ou devrais-je dire l’ambassade du Burkina Fasso

Le fleuriste apparaît une dernière fois à 1h07. Après s’être échappé de son ascenseur Julien constate que sa luxueuse voiture a disparu, remplacée par.. euh remplacée par quoi exactement ? 

Le 168 boulevard Haussmann.

0h16 : Louis n'en fait qu'à sa tête ! Puisque le propriétaire a laissé les clés sur le contact il s'autorise donc à lui "emprunter" son véhicule !
La perspective du boulevard Haussmann.

0h17 : Louis découvre les joies des toits ouvrants automatiques !
L'hôtel Friedland est toujours en place !
0h17 : Florence attend désespérément que Julien vienne la rejoindre...


Au 182 boulevard Haussmann il n'y a plus de Royal Camée mais un Finzi, restaurant Italien !

0h21 : Florence pense avoir vu Julien partir avec la jeune fleuriste ! La voici dans les affres du désespoir.
Covid-19 oblige le restaurant Finzi est fermé (à l'heure où j'écris ces lignes dieu seul sait quand il ré-ouvrira). J'ai néanmoins pu photographier l'intérieur à travers la vitre. On voit bien qu'il a été totalement remanié par rapport au film.

Le Royal Camée apparaît à nouveau à 1h08. Julien, enfin libre, se rend au rendez-vous de Florence... avec un jour de retard !
La boutique a changé mais la porte du 182 boulevard Haussmann reste reconnaissable.

1h08 : Julien arrive finalement au Royal Camée.




1h11 : Le Royal Camée apparaît une dernière fois, quelques instants à peine avant l'arrestation de Julien.
Dernier regard sur le Finzi !

0h23 : Retour à la continuité du film. Florence, hagarde, tente d'ouvrir les portes du Consortium Carala. Une petite fille l'interpelle.
Retour au 29 rue de Courcelles.

0h24 : Florence erre comme une âme en peine. Elle passe devant un bar qu'elle et Julien fréquentaient habituellement...
Le Luigi's Bar a, depuis belle lurette, disparu. A sa place un hôtel siège, désormais, au 6 rue du Colisée.
0h26 : Florence continue son errance à travers Paris à la recherche de Julien.
L'atelier Renault a été largement modifié depuis le film, mais il reste néanmoins présent au 53 avenue des Champs Elysées.

0h37 : Les déambulations nocturnes de Florence l’amènent devant un restaurant vietnamien.
Le Lac-Hong existe toujours au 67 rue Lauriston. Cependant si le nom est identique, par contre, la devanture n'a pas grand chose à voir. Moralité : soit le restaurant a déménagé, soit la devanture du film était factice... sans réponse.

0h41 : Un garde vient faire une promenade nocturne dans les locaux de l'entreprise Carala.
La vue depuis la porte de l'immeuble Kwerk. On reconnait bien les fenêtres du bas.
0h44 : Les déambulations de Florence se concluent dans un bar (dont le nom n’apparaît pas à l'écran).
Le bar dans lequel se déroule cette scéne n'a pas été choisi au hasard ! Il s'agit tout simplement du bar favori de Louis Malle. Il y a passé de nombreuses heures, perdu dans la vie nocturne parisienne. Le bar de l'époque s'appelait le "Bar-Bac" (car situé au 13 rue du Bac). Il a néanmoins fermé ses portes depuis fort longtemps et a été remplacé par le présent bar "Les Antiquaires".

0h50 : Le hasard a conduit Louis et Véronique dans un Motel de Trappes. Louis tue "malencontreusement" un couple de touristes allemands ! Il prend la fuite avec sa compagne dans la voiture de ses victimes.

En guise de Trappes, le couple maudit a commis son méfait au Touquet ! (Comme lieu de tournage mieux vaut Le Touquet que Trappes, il faut bien le dire). Le Motel du film semble avoir été détruit, cependant quelques pavillons restent reconnaissables.

0h50 : Le jeune couple rentre sur Paris après avoir tué les deux touristes allemands.
Le Pont Bir-Hakeim reconnaissable entre mille.
A noter que la photo précédente a été prise par mes soins. J'ai voulu reprendre la photo avec un beau ciel bleu... Quelle ne fut pas ma surprise de constater que le pont est actuellement en travaux ! Manifestement, la rénovation ne fait que commencer et elle durera encore de longs mois !
0h50 : Les jeunes amants abandonnent leur voiture sur le pont...
Le pont Bir-Hakeim avant les travaux...


...Le pont pendant les travaux.

0h51 : Louis et Véronique rentrent chez cette dernière.
Le métro Bir-Hakeim.

0h51 : Le couple rentre finalement chez Véronique.
Il est amusant de noter que, durant le film, l'adresse exacte de l'appartement est réellement indiquée ! (Merci à Louis Malle de me faciliter le travail). Nous sommes donc, comme mentionné par Jeanne Moreau, au 55 boulevard de Grenelle
1h18 : Véronique et son blouson noir de copain apprennent, après leur tentative de suicide avortée, que Julien Tavernier est accusé du meurtre des touristes allemands à leur place !
La façade du 55 boulevard de Grenelle.


J'ai bien entendu tenté de rentrer dans le 55 boulevard de Grenelle afin de vérifier si l'escalier du film est toujours en place... Un digicode récalcitrant m'en a hélas empêché. Il est cependant peu probable que la machinerie de l'ascenseur soit encore accessible !



3 commentaires:

  1. Bonjour, je vous précise que le Motel du Touquet existe toujours, il est bel et bien en place et quasiment pas modifié !

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  2. Rue de Courcelles, la voiture "luxueuse" est remplacée par une Isetta, ce singulier véhicule s'ouvrant sur la partie frontale.
    J'ai bien l'honneur.
    G.H.B.

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