De nos jours, le numéro 113 n'existe plus,
absorbé par les voisins, le 115 et le 111, à l'occasion des travaux
d'agrandissement de l'Ecole Alsacienne de Paris.
Nous n'avons donc pas pu voir l'immeuble dans
lequel il habitait mais avons pu suivre les indications du chapitre "Avec
Pascin au Dôme", pour passer de la rue Notre Dame des Champs au boulevard
Montparnasse : "J'étais entré par la porte de derrière, dans la boulangerie qui donne sur le
boulevard Montparnasse et j'avais traversé la bonne odeur des fours à pain puis
la boutique et j'étais sorti par l'autre issue".
Le passage emprunté par Hemingway existe encore
de nos jours. Il se trouve dans la boulangerie Méli-Mélo, située au 151,
boulevard du Montparnasse. Un portrait de l'écrivain orne désormais la
porte y donnant accès.
Hemingway est venu à Paris sur les conseils de l'écrivain Sherwood Anderson auquel le jeune journaliste qu'il était alors avait confié son désir d'écrire davantage que des articles de presse.
Anderson pensait que Paris était le lieu idéal pour progresser dans l'écriture et rencontrer des grands écrivains exilés outre-Atlantique. Il lui remit des lettres d'introduction.
C'est ainsi qu'Hemingway rencontre, en particulier, Gertrude Stein. Il évoque les visites qu'Hadley et lui font, au 27, rue de Fleurus, le domicile de Gertrude Stein et de sa compagne, Alice Toklas. C'est Gertrude Stein qui le convaincra d'abandonner le journalisme au profit de la seule écriture romanesque.
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Scène de Libération, rue de Fleurus. |
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Un atelier 27, rue de Fleurus. |
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La cour du 27, rue de Fleurus est méconnaissable avec son jardin en plein milieu ! Pourtant l'atelier, domicile de Gertrude Stein, est toujours présent en arrière plan. |
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L'appartement de Gertrude Stein, tel que décrit par Hemingway "Nous avions adoré le vaste studio et les beaux tableaux : on eût dit l’une des meilleures salles dans le plus beau musée, sauf qu’il y avait une grande cheminée et que la pièce était chaude et confortable" |
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En discutant avec l'aimable jardinière nous avons appris que le studio de Gertrude Stein était celui qui faisait angle, avec la porte grise. |
Hemingway rencontre également Ezra Pound et fréquente l'atelier, où ce dernier vit avec sa femme, Dorothy, au 70, bis, rue Notre Dame des Champs. Pound corrige les textes d'Hemingway, en échange de leçons de boxe.
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La rue Notre Dame des Champs. Le 70 bis, est visible sur le côté gauche de la photo. |
Il fait la connaissance de
Francis Scott Fitzgerald au Dingo Bar et sera, avec Hadley, un visiteur du 14,
rue de Tilsitt où vivent les Fitzgerald.
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La rue de Tilsitt en 1900. |
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F. Scott Fitzgerald danse avec sa femme, Zelda, et leur fille, Frances "Scottie" devant le sapin de Noël de leur appartement parisien, au 14, rue de Tilsitt. |
C'est toujours Sherwood
Anderson qui a recommandé aux Hemingway la librairie Shakespeare and Company, alors
située au 12, rue de l'Odéon et tenue
par Sylvia Beach.
Lorsqu'Hemingway fait sa
connaissance, Sylvia Beach habite au 18, rue de l'Odéon, avec Adrienne Monnier,
laquelle a ouvert la librairie "Aux amis des livres", au 7, rue de
l'Odéon : Hemingway y achète ou emprunte de très nombreux livres, en
particulier, des romans russes, qu'il dévore.
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La rue de l'Odéon avec, dans la perspective le Théâtre de l'Odéon (pas encore appelé Théâtre de l'Europe).
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La librairie "Aux amis des livres". |
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La librairie Shakespeare and company à l'époque. |
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L'agencement de la façade du 12, rue de l'Odéon a totalement changé, cependant la perspective ne trompe pas : la librairie se trouvait bien ici ! |
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Hemingway pose devant la librairie Shakespeare and Co et fait admirer son bandage. (Croyant tirer sur la chasse d'eau l'auteur a, en réalité, tiré sur la chaîne du vasistas, avec pour résultat, de se prendre la fenêtre sur le crâne ! Ecrivain, un métier à risque !). |
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Sylvia Beach et James Joyce en 1921 sur le seuil de la librairie Shakespeare and Company. |
Les raisons que donne Hemingway à la fréquentation de certains lieux sont parfois d'ordre purement pratique. Ainsi, en ce qui concerne le Jardin du Luxembourg, dans le chapitre "La faim est une bonne discipline" :
"Le meilleur endroit où aller était le jardin du Luxembourg, car l'on ne voyait ni ne sentait rien qui fût à manger, tout le long du chemin (...)".
En trompant sa faim, au Jardin du Luxembourg, il prend l'habitude d'aller au musée du Luxembourg (où les œuvres de Manet, Monet et Cézanne étaient alors accrochées) et il se prend alors de passion pour la peinture de Cézanne : "J'appris à comprendre bien mieux Cézanne et à saisir vraiment comment il peignait ses paysages, quand j'étais affamé."
C'est la faim, toujours, qui lui fait découvrir le charme de la place Saint Sulpice "où l'on ne trouvait pas de restaurants (...), où il n'y avait qu'un square tranquille, avec des bancs et des arbres, une fontaine avec des lions (...) Il y avait aussi l'église."
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Le Palais du Sénat vu de la terrasse est. |
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Peu de changement au Jardin du Luxembourg, on s'attendrait presque à voir les enfants revenir avec leurs cerceaux ! |
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Quand ce ne sont pas des cerceaux, c'est un poney ! |
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Le poney a disparu mais la plaque d'égout est toujours là. |
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Le mur du musée du Luxembourg. |
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Le musée du Luxembourg en 1900. |
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Le hasard n'existe pas : lors de notre passage au Musée du Luxembourg une exposition (notamment) consacrée à Gertrude Stein commençait ! |
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La place Saint Sulpice. |
Hemingway n'oublie pas que Paris est une ville traversée par un fleuve et il fait des croquis des "gens de la Seine", en observateur avisé : "Je flânais le long des quais après mon travail, ou quand j'essayais de trouver une idée".
Il contemple, en connaisseur, les pêcheurs "A la pointe de l'île de la Cité, au- dessous du Pont Neuf, où se trouvait la statue d 'Henri IV, (...) il y avait là un petit parc (...) et dans les trous et les remous qu'engendrait le mouvement de l'eau contre les rives, il y avait d'excellents coins pour la pêche."
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Les pêcheurs de la Seine, chers à Hemingway. |
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Des enfants du siècle dernier batifolent gaiement dans un tas de sable. |
Lecteur et écrivain, il fouine dans les boîtes des bouquinistes, sur les quais, à la recherche de livres américains.
Il repère rapidement qu'il doit essentiellement se concentrer sur les boîtes aux alentours de la Tour d'Argent et du quai des Grands Augustins au quai Voltaire. Là, se trouvaient les hôtels favoris des clients américains susceptibles de laisser des livres à leur départ.
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Les bouquinistes avec Notre Dame dans la perspective. |
Passionné de sport, l'écrivain ne se contente pas de donner des cours de boxe à Ezra Pound, il va assister à des matchs au stade Anastasie, rue Pelleport. Il assiste également à des courses cyclistes et de chevaux, à Auteuil et Enghien.
Lorsqu'Hemingway
gagne aux courses, ou reçoit de l'argent, pour un article, un texte, il peut
aller dans un restaurant, ou un café.
Les cafés, comme
lieux de sociabilité, étaient, évidemment, une nouveauté pour les expatriés américains.
S'il s'agissait de
consommer seulement une boisson (café, verre de vin), Hemingway se
plaisait à s'installer dans l'un d'eux pour écrire.
Son restaurant
préféré semble avoir été Michaud, 29, rue des Saints-Pères, à l'angle de la rue
Jacob, (de nos jours, le Comptoir des Saints-Pères). C'est, toutefois, un
établissement où son impécuniosité lui permet rarement de se rendre : "Michaud était un restaurant coûteux et troublant pour nous".
Il peut y apercevoir James Joyce qui dîne en famille. Le même James Joyce l'invitera, un jour, à prendre un verre aux Deux Magots.
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En dépit d'efforts acharnés, il n'a pas été possible de trouver de photo d'époque du 29, rue des Saints-Pères ! Vous devrez donc vous contenter du 28. |
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Le Comptoir des Saints-Pères, ex-Michaud, est encore visible au fond, à droite de la photo, au 29, rue des Saints-Pères. |
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Que serait Saint-Germain sans son église et sans le café Les Deux Magots ? |
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L'église est en travaux mais le café Les Deux Magots est toujours là. Notez la croissance impressionnante de l'arbre. |
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Les Deux Magots à la belle époque. |
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Si le café est toujours là, l'agencement général de la place a totalement changé. |
Un autre lieu apprécié par Hemingway où, en particulier, il se rend, seul, un jour, après une rentrée d'argent inattendue, est la brasserie Lipp, boulevard Saint-Germain. Ce jour là, il se régale de pommes à l'huile, de cervelas, et accompagne son repas avec de la
bière.
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La Brasserie Lipp au début du siècle dernier. |
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Hemingway attablé à la Brasserie Lipp. |
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"Il ne fallait pas longtemps pour aller chez Lipp. (...) Il y avait peu de monde à la brasserie, et quand je pris place sur la banquette, contre le mur avec le miroir dans mon dos et une table devant moi, et quand le garçon me demanda si je voulais une bière, je commandais un distingué, une grande choppe en verre qui pouvait contenir un bon litre, et une salade de pommes de terre." |
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"Vous êtes assis à la place d'Hemingway ! Je peux vous dire également que son plat préféré était le cervelas !" Merci au personnel attentif de la Brasserie Lipp. |
Avant de bien
connaître l'auteur de Gatsby le magnifique et d'aller chez lui, rue de Tilsitt, Hemingway l'a rencontré au Dingo Bar, rue Delambre (à présent, l'Auberge de
Venise) : "Il arriva une chose bien étrange pour la première fois que je
rencontrai Scott Fitzgerald (...) Il était entré au Dingo Bar, (...) où
j'étais assis (...) ; il s'était présenté lui-même".
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Le Dingo Bar : le lieu de rencontre d' Ernest Hemingway et de F.Scott Fitzgerald. |
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L'ex Dingo Bar rend hommage à son illustre client. |
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"Fréquenté par Ernest Hemingway de 1899 au 1961" Un léger problème de datation et un italianisme. Cependant, l'équipe du bar est très sympathique et nous a aimablement laissé faire des photos de l'intérieur. |
Hemingway,
lorsqu'il vit rue Notre Dame des Champs, affectionne le Nègre de Toulouse, au
159, du boulevard Montparnasse "où nos serviettes de table, à carreaux
rouges et blancs, étaient glissées dans des ronds de serviette en bois et
suspendues à un râtelier spécial en attendant que nous venions dîner".
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Nous n'avons pas trouvé d'information concernant cette photo (ni sur l'époque, ni sur les gens y figurant). |
Hemingway mentionne le
Sélect et la Rotonde. Le Dôme lui sert, par ailleurs, de
décor pour le chapitre "Avec Pascin au Dôme".
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Le café Le Dôme. |
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La terrasse du Dôme est désormais couverte. |
Mais son café
préféré, qui lui sert de cabinet de travail, de lieu de rencontre et qui est, selon
sa formulation lapidaire "un des meilleurs cafés de Paris",
c'est la Closerie des Lilas !
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La Closerie des Lilas, le bar préféré d'Hemingway. |
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Tout le monde est sur son 31 devant la Closerie ! |
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Derrière la végétation, la devanture de la Closerie reste identique. |
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L'intérieur de la Closerie, au début du 20ème siècle. |
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Peu de changement 100 ans plus tard. |
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Une plaque discrète marque la place préférée d'Hemingway. |
Il
est, toutefois, un lieu parisien qui sera lié pour Hemingway à deux événements,
l'un désagréable, l'autre catastrophique : il s'agit de la gare de Lyon.
C'est à la gare de Lyon qu'Hemingway et Scott Fitzgerald se sont donné rendez-vous, afin de prendre un train pour Lyon et d'y chercher la voiture abandonnée par Scott et Zelda Fitzgerald.
L'idée de cette escapade a enchanté Hemingway. Mais il attend vainement Fitzgerald, tout en faisant les cent pas dans la gare. En désespoir de cause, il prend, seul, le train qu'ils se sont convenus de prendre ensemble.
Cette mésaventure est, certes, déplaisante mais un événement bien plus grave pour l'écrivain s'est produit, dans cette même gare.
Il en parle dans le chapitre " La faim est une bonne discipline "
"(...) tous mes écrits avaient été volés à la gare de Lyon, avec la valise de Hadley, le jour où elle avait voulu me faire la surprise de m'apporter mes manuscrits à Lausanne, pour que je puisse y travailler pendant nos vacances en montagne."
On peut penser, ainsi que certains auteurs le font, que ce vol des manuscrits fut un des premiers éléments de la désaffection d'Ernest Hemingway pour Hadley.
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La gare de Lyon en 1900. |
Mais, bien des années plus tard, lorsqu' Ernest Hemingway retrouve les notes qu'il a prises sur sa vie parisienne avec Hadley et qu'il commence ce qui deviendra A moveable Feast, son texte est moins un guide du Paris des années 1920, qu'un hymne à ses débuts d'écrivain, à sa jeunesse perdue, à ce qu'il considère comme la période la plus harmonieuse de sa vie, en compagnie d'une femme qu'il continue d'aimer.
De manuscrits perdus à tout jamais à des pages retrouvées, c'est un voyage à la recherche d'un bonheur perdu, dans une ville magique.
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Le buste de l'auteur continue d'orner le bar du Ritz, où nous avons commencé notre article. |
Merci, cher M.Malcontent!!!!! Le content extraordinaire!!! Probablement le film "Tegeran-43" pourait vous interesser dans le secteur de vos recherches.....(Alain Delon compris) ... a partir de 55'49"... https://www.youtube.com/watch?v=-TaOAwtzeGg
RépondreSupprimerMerci de votre retour et de la référence cinématographique. Avez- vous lu le roman de Philip Kerr, Hitler's place qui traite également de la conférence de Téhéran, en 1943 ?
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